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samedi 9 février 2019

Zoom sur une nouvelle expérience du fanzine avec le collectif SideShow

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8h45 – un samedi, au printemps

une petite fille qui vit depuis tout juste un an dans un appartement au 7ème étage d’un immeuble hlm, dans une cité multicolore comme on en trouve dans certaines banlieues des grandes métropoles françaises, une fille qui dort dans une chambre carrée qu’elle partage avec ses deux parents, maman 28 ans et demi et papa 29 ans, mais pas dans leur lit (faut pas pousser), une fille qui parle à ses trois poupées barbies chauves et écoute ronfler son ourse en peluche rose, et qui s’appelle irène se réveille, plutôt d’une humeur pas terrible à vrai dire ; elle traîne au lit un moment, enfile enfin une pantoufle le pied gauche avant le pied droit  revêt sa robe de chambre fleurie, traverse un salon en pagaille et déboule dans la cuisine, avec le visage d’un émoticône contrarié ; elle maugrée un « bonjour », ouvre le frigo et s’exclame, bah, y’a rien, se lamente, rien n’est prêt, s’installe sur sa chaise, devant papa qui feuillette son journal bêtement précise la fille dans sa petite tête de fille, et non loin, maman debout, s’affaire nonchalamment en ce samedi frais et clair

Me saisir ponctuellement d'un sujet extérieur est un défi que je ne résiste pas à relever. Surtout s'il s'agit de dessiner et/ ou d'écrire !

"8 ans et déjà acariâtre !" est celui que lance le collectif associatif toulousain SideShow (Krill MacBernik et Monsieur Alice) pour son fanzine #4. Je réponds avec enthousiasme à l'appel lancé à l'automne dernier via Facebook. Le sujet me commande curieusement (ou peut-être pas ?) de parler d'anniversaire(s). Je dis "curieusement" parce qu'il n'y a pas de coïncidences dans la vie, il n'y a que des rendez-vous, n'est-ce pas ?

Mon esprit créatif aime, se nourrit, dévore et régurgite les contraintes ; mon esprit créatif un brin retors, d'autres diraient "complexe" aime mettre des boîtes dans d'autres boîtes, recherche les complications sciemment, multiplie par jeu les emboîtages lexicaux et iconiques. 

9h25 – autour d’une table apprêtée pour trois

à présent la fille qui s’appelle irène se retient de pleurer, affiche un air renfrogné, elle a un visage mutique devant son bol de chocolat au lait chaud  la peau laiteuse plisse dessus comme si c’était vivant et ses deux tartines au nutella, servis par maman les cheveux ébouriffés l’air pas réveillé du tout qui n’a rien entendu de ce que sa fille a murmuré la tête quasi dans le frigidaire ; la fille ne dit pas merci à ces attentions tout particulièrement attendues aujourd’hui, en ce jour que papa et maman, l’ourse rose, le trio des barbies laides, son bol de chocolat vivant, le journal de papa, la Terre entière ! semblent avoir oublié : son anniversaire

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Je tricote des fictions. En suivant différents patrons et en utilisant plusieurs fils et plusieurs genres de fils. Le plus souvent : le mot, le signe de ponctuation, les influences culturelles, la mise en page, la figure de style, les néologismes... J'ouvre mes tiroirs mémoriels que sont, par exemple, l'enfance, la prime adolescence, les copains, les années lycée, les vacances en colo, les chouettes pubs à la télé... 

"Acariâtre" : ronchon(ne), bougon(ne), querelleur(se), désagréable, grincheux(se), revêche, irascible, hargneux(se), aigri(e), bilieux(se), chagrin(e), maussade... Être d'humeur ou d'un tempérament difficile...

Pour produire au mieux dans le contexte de ce fanzine, je réalise, à postériori, que je n'ai pas dérogé à ma petite règle intérieure des séries, dominée par le chiffre 3 : je propose 3 illustrations et une histoire mettant en scène 3 personnages principaux. Mes cadres fictionnels de référence sont aussi convoqués, en particulier, le conte, l'autofiction et le dessin animé.

la fille qui s'appelle irène affiche un air peu amène, les sourcils froncés, le bas du visage coincé dans la paume de ses deux petites mains aux extrémités rougissantes, elle ne manque pas de remarques acides qui tournoient dans sa tête brune, papa doit être bien content aujourd'hui, qu'elle se dit, puisqu'il a tout ce qu'il veut pour être heureux, un café brûlant deux sucres une biscotte au beurre salé et une bête de journal où cacher son menton pas rasé pour oublier la chose la plus importante du monde, la fille qui s'appelle irène n'épargne pas l'autre, la maman chiffonnée, aux gestes lents qui oublie toujours tout ; la fille a le rouge cramoisi qui lui monte aux joues, les épaules et le cou douloureux, comment ça se fait que le frigo que la maison que les parents que les cheveux que tout le visage, sont pas remplis ni rangés ni lavés ni coiffés ni rasés de près pour ma fête, s'écrie finalement irène, la voix chevrotante

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Ici, je mêle quelques libertés grammaticales à une trame narrative au cheminement simple et progressif, construite à partir de souvenirs et d'inventions. Une idée fixe ? Surtout une forme de programme esthétique à incarner, autant de fois que possible : travailler un texte court comme une matière visuelle et sonore. Utiliser les ressources du média artistique pour construire à partir des bribes de véritables fictions.
 
Mais l'enthousiasme ne doit pas me faire oublier le cadre de départ, la commande, l'invitation coup de pouce à cette nouvelle expérience artistique, qui est : l'offre de 4 à 5 pages qui présenteront des images en n&b ou en couleurs (illustrations, dessins, BD...) et/ou un ou plusieurs textes. Car, il s'agit d'une publication dont le but est de mettre en avant, comme dans tout fanzine, des créatifs singuliers et joyeusement variés si possible.  

Les trois images visibles ci-dessus La dormeuse, L'écolière et L'invitée constituent l'ensemble de ma proposition graphique grâce auquel je m'amuse à présenter une variation autour de l'adjectif  "acariâtre". Le conte à l'envers (= un ou des éléments du récit est modifié, inversé) sert ma recherche-création. Pour le challenge, j'explore les possibilités plastiques du dessin en noir et blanc, au feutre, sur un format de travail plus grand que d'habitude.  

Le récit bref Une dramédie enfantine dont je livre quelques extraits ci-dessus existe en plusieurs versions, par exemple : un "premier jet" écrit et imprimé pour le fanzine ; une autre version "réécrite" et lue en public, à l'occasion de l'apéro littéraire Les petites lectures dans la cour consacré au thème "Liens" (La lecture à voix haute est une manière - vivante -, pour son auteur, de rendre accessible un texte, de le faire entendre et de l'entendre. Chez moi, c'est aussi l'occasion de donner corps (une voix) à différents personnages et proposer un texte littéraire alternatif).

Le fanzine, conçu comme un petit objet d'art à lire, a été publié en février dernier. Il présente  les images de Krill MacBernik, Clara Langelez, Paulaulart, Manu Narciso, Catiana Saint-Amour et de moi-même.


© ema dée

mercredi 3 août 2016

Nouvelle anatomie d'une oeuvre personnelle : Ma freaks à moi

Passionnées internautes et charmants blogueurs,

Di badi-badi-dam-dadou...

Il est temps pour moi de lever le pied et de prendre quelques jours de repos, m'aérer l'esprit, faire des rencontres, expérimenter de nouvelles choses... bref, profiter un peu des vacances. Avant de mettre Le Horlart sur pause jusqu'en septembre au moins, et de suspendre - un chouïa - ma créativité galopante, j'aimerais proposer quelques visuels d'un petit projet de dessin tout récent qui m'a bien amusé.

Il y a quelques semaines, je décide de participer à un appel à contribution (dessin, illustration ou texte). Plus par goût du jeu que par le désir farouche d'être retenue (même si l'idée m'a effleurée, je l'avoue, ça fait toujours plaisir de faire partie des sélectionnées.) Ce que je veux dire, c'est que créer une œuvre pour un cadre inédit offre de nouvelles possibilités. Oui, car c'est, selon moi, l'occasion de mettre son style, ses obsessions, sa démarche à l'épreuve. Le sujet : Freaks pulsion lancé par la maison Les Éditions Terriennes dans la perspective de la publication du n° 4 de son graphzine. Avec une contrainte, l'obligation de mettre en couleur son(ses) oeuvre(s) en suivant une palette prédéfinie.

J'oriente mes recherches sur les thèmes de la gourmandise et du corps. Je trouve sur Internet la photo d'une jolie femme brune et plantureuse qui m'inspire et que tout de suite, j'ai envie d'interpréter...

Il serait archi-faux de dire que je me suis précipitée quand j'ai reçu l'info via Facebook. Et ce,  pour deux raisons : d'abord, la couleur et moi, c'est une histoire compliquée, alors imaginez utiliser les couleurs de quelqu'un d'autre ! Ensuite, le sujet : dessiner des freaks, pas de problème, aucun de mes personnages n'est vraiment normal, j'aime le biscornu, l'originalité, l'excessif et le mal fichu. Par contre, "Freaks pulsion" ça me parle déjà un peu moins. Mais je me lance quand même dans l'aventure.

Je réalise cette première esquisse au pinceau et l'encre de Chine sur du papier calque. Le dessin à l'encre de Chine est pour moi préparatoire : il libère mon trait et m'installe dans ma pratique. Je m'amuse à déguiser le personnage sans me censurer...

En ce moment, j'ai plutôt tendance à dessiner des portraits en buste, assis, des compositions de personnages imaginaires illustrant mon actualité, à me lancer dans des appropriations personnelles d’œuvres connues, ou bien à travailler sur mon projet sur les arbres. Donc, la direction à prendre pour ce projet-ci a pris un petit moment à venir. Une "déviance" qui m'intrigue tout particulièrement : la compulsion d'achat.

Prenant une certaine distance avec l'esquisse à l'encre - ce qui arrive souvent quand je passe du pinceau au crayon à papier - le sujet se précise peu à peu. Les crayonnés sont souvent très sympa grâce au mouvement et à la matière laissés à la surface du papier (ou repentir)...

Chasser le naturel, il revient au galop : mon quotidien reprend le dessus sur la contrainte du sujet. J'aime les soldes. Il m'est arrivé d'acheter un vêtement juste parce qu'il était soldé ou parce que la voisine avait posé ses mains dessus. La pulsion est toute trouvée, non ? Et puis, même si ce n'est pas vraiment une pulsion, ça me va. J'ajoute quelques obsessions : une touche de disproportion dans la physionomie du personnage avec la chevelure façon Priscilla folle du désert et des bras de déménageuse, des dents pleines de personnalité, un regard charmeur, des sourcils de clown et bien sûr, les incontournables micro-ballerines, reines de l'été.

L'encrage est une étape difficile et délicate. Il faut respecter le trait griffonné sans y penser vraiment ; il faut le clarifier sans lui ôter sa sensualité. D'un autre côté, cette étape permet de préciser ou de rajouter des petits détails : ici, les motifs et le maquillage, par exemple.

Il n'y plus qu'à ajouter les couleurs. C'est dur... très dur ; le dessin me plaît comme il est. Ajouter plus me semble soudain artificiel, mais c'est le jeu. Pourtant, j'ai encré le personnage de manière à ce qu'il reste de la place pour une mise en couleur, même sobre. Mais quelles couleurs ajouter ? En général, mes colorisations procèdent d'une pulsion c'est-à-dire d'une envie brutale d'une lumière spécifique autour de laquelle tout va s'organiser, prendre sa cohérence et trouver son équilibre... Et, j'ai tout à coup envie de guimauve et d'un bonbon à la violette... L'infographie me soutient dans mes tâtonnements et mes essais.  J'opte finalement pour les contrastes colorés, toujours efficaces.


Et voilà le résultat.  Bon, il n'a pas été retenu, mais quel défi ! Je pourrai vous expliquer à présent, pourquoi la chevelure pistache, les cinq piercings, les cœurs sur la robe, le regard en biais, les fleurs, ou encore les doigts boudinés dans la bouche... mais en avez-vous vraiment besoin ?

Belles vacances à toutes et à tous !
 
Pour retrouver mes humeurs du moment, je suis tout le reste de l'été sur le projet de dessin quotidien tout carré et dit "à l'arrache" le Horlart à 1,99  et de temps temps sur Improzine.

© ema dée

mardi 8 décembre 2015

Un regard pour le fanzine ou la révolution du DIY

Je me passionne pour le fanzine depuis quatre ans.



"Fanzine : mot-valise d’origine anglo-saxonne, composé à partir de fanatic et de magazine."

"DIY : pour Do It Yourself qui signifie fais-le toi-même ou fais-le par toi-même ou encore fabrique-le toi-même ".


C'est quoi, c'est qui ?

Pour commencer, c'est quoi un fanzine ? Très brièvement, il s'agit d'une publication hors norme qui contient des textes et/ ou des images de toutes natures* et qui utilise des réseaux de diffusion  "sous-terrains" (= underground) c'est-à-dire non officiels, libres et très variés. Édité souvent en très petites quantités, le fanzine est considéré comme une forme "sauvage" de l'édition car ses modes de distribution comme sa présentation, ses contenus, ses formats sont protéiformes et cette diffusion concerne souvent des cercles privilégiés.

*Pour les images : dessin, portrait, scénette, au stylo bille, crayon, feutre, plume, gravure, collage, photomontage, photographie, insert de coupures de journaux... Pour les textes : essai, poésie, nouvelle et micro-nouvelle, parole de chanson, chant engagé, message politique, étude, article critique... Entre les deux : récit graphique, texte illustré, roman-photo, bande-dessinée, jeu,...  Mais aussi cassettes audio, CD de musique... Les procédés d'impression et les techniques de reliure - divers - sont choisis en fonction du nombre d'exemplaires décidés, du coût - bien sûr - mais aussi de leurs qualités esthétiques : risographie, sérigraphie, photocopiage, impression laser ou offset pour l'impression, reliure "dos carré" - qui est une reliure industrielle - ou en cahiers "cousus" ou "agrafés" qui peut se faire soi-même... pour la reliure.

Apparu dans les années 1970, le fanzine est surtout un moyen formidable et peu onéreux pour de nombreux créatifs - d'images, de textes mais aussi de sons - de se faire connaître, d'exprimer un point de vue sur un sujet qui les passionne ou tout simplement d'exhiber leurs créations et d'y trouver une forme de stimulation dans l'échange et le partage - sans intermédiaire.

L'essence du fanzine est résolument sa nature expérimentale tant dans sa facture, sa présentation visuelle que dans son contenu. Il ne se limite à rien, tous les sujets, styles d'écriture et expressions graphiques sont permis. Un fanzine peut n'être composé que d'images, de textes découpés, collés puis photocopiés, de photomontages, d'un assemblage de textes et d'images sans recherche particulière d'une mise en page définie, ou de pages manuscrites - extraites de carnets - ou dactylographiées. Le fanzine peut à l'inverse être très travaillé et se présenter dans une mise en forme léchée, comparable à celle de revues connues et très bien diffusées ; on peut alors parler de (mag)zines.

Enfin, le fanzine représente pour certains créatifs une première étape d'importance avant le lancement d'un projet d'édition d'envergure (revue, recueil de texte, album...)

L'ampleur du phénomène explique que se soient multipliés les salons qui lui sont consacrés en France (Lille, Paris, Lyon...) et ailleurs (Boston, Bruxelles, Copenhague...) et les bibliothèques et galeries en ligne exposant des fanzines à consulter et/ ou à acheter.


Mes premiers pas dans le fanzine

Je découvre l'existence du fanzine - dont j'avais entendu parlé vaguement et que j'avais vaguement oublié - grâce à deux événements : la première édition de festival de bandes dessinées indépendantes Formula Bula et ma visite à Fanzines ! , un autre festival parisien dédié quant à lui à l'autoédition graphique.

Formula Bula qui s'est tenu en 2011 et 2013 à Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis) et au Point éphémère en 2015 (Paris 10ème) est l'occasion de rencontres multiples (ateliers, conférences, signatures, expositions) entre des lecteurs amateurs ou curieux du genre et des acteurs de la bande dessinée (dessinateurs, scénaristes, coloristes, libraires, éditeurs, critiques d'art.) Fanzines ! - qui propose au sein de la bibliothèque Marguerite Duras (Paris 20ème) un ensemble hétéroclite de références - annuellement augmentées et en provenance des quatre coins du monde grâce à un appel à contributions lancé courant juin par les éditions Papier gaché - a fêté sa cinquième édition cette année.

 Pluie de fanzines suspendus. 3ème festival Fanzines ! 2014
(Vous aurez reconnu ma publication tout de rouge tue, en haut à gauche.)

En  2011, j'assiste à une table ronde qui me permet de faire notamment la connaissance des activités de la librairie Le Monte-en-l'air (Paris 20ème) et du dessinateur français Guillaume Bouzard, connu, entre autres, pour ses bandes dessinées autobiographiques (The autobiography of me too, éd. Les Requins marteaux, 2004) ou mettant en scène des anti-héros (Plageman, l'homme plage, éd. 6 pieds sous terre, 1997.) Je retiens de cette rencontre deux points essentiels :

-1°) Le Monte-en-l'air soutient l'auto-édition graphique et accueille dans ses bacs et étagères tous les projets de fanzines sans restriction.

-2°) G. Bouzard a débuté dans la bande dessinée en faisant des fanzines. Il convient qu'ils représentent une forme de publication plutôt intimiste, voire confidentielle. Espaces à exploiter complètement libres de tout jugement, consensus ou code prédéfini, les fanzines sont, au regard de sa propre expérience, le lieu rêvé pour qu'un artiste trouve sa voix, ses formes d'expression, ses thèmes propres et puisse collaborer à de multiples projets. En osant prendre des risques esthétiques.

En 2012, je sillonne les allées étroites de la salle des ventes de fanzines et autres petits produits auto-produits du festival Fanzines ! , regarde avec avidité les revues, albums, feuillets... joliment suspendus le long des cimaises dans un espace dédié et consulte avec fièvre les bacs débordant d'autopublications. Tous les fanzines possibles semblent être réunis ici : de la feuille A4 pliée en deux et agrafée ou cousue au milieu, à la publication de type magazine, reliée, exposant fièrement sa couverture en couleurs et ses 200 pages de textes illustrés, en passant par les mini-livres, les livres-dépliants, les livres en tissu...

Ce sont ici essentiellement des œuvres sur papier d'artistes qui travaillent seuls ou des productions de collectifs. Ce sont ici des fanzines ou des graphzines (fanzines ne contenant que des images.)


Pourquoi un tel intérêt ?

Mon engouement et ma curiosité seront ravivés très récemment grâce à la découverte dans une bibliothèque universitaire du livre Fanzines, la révolution du Diy paru en 2010 aux éditions Pyramid qui actualise ma connaissance empirique du fanzine. C'est un ouvrage richement documenté d'un peu plus de 250 pages qui fait l'historique du fanzine, depuis les fameux feuillets photocopiés un peu cra-cra et distribués "sous le manteau" des années 1970 jusqu'aux nouvelles créations collectives développées sur le web.

On apprend par exemple que le fanzine aurait plutôt des origines punk. On constate la grande diversité des productions qui entretiennent avec une certaine actualité des liens plus ou moins forts et la capacité du genre à aborder des sujets très différents. On apprend aussi qu'il existe un fanzine féministe ou encore que le fanzine a connu plusieurs "révolutions". Il faudra se le procurer pour en savoir plus.

http://www.undressed-design.com/2013/11/un-peu-de-lecture-1-fanzines-la-revolution-du-diy/

Comment le fanzine intervient-il dans ma production ? Quelle place est-ce que je lui accorde ? Le fanzine représente pour moi une sorte de fantasme. Celui de pouvoir gérer tout le circuit d'une publication originale, "particulière", c'est-à-dire assumer comme j'en ai envie la création, la fabrication, la distribution et la vente d'une œuvre sur papier dont j'aurai décidé - seule - l'utilité, la pertinence et l’esthétique.

Pour l'instant, je ne crée pas de fanzines à proprement parler ; je crée des livres uniques ou je développe des projets pour lesquels je fais appel à des sociétés d'autoédition en ligne qui me fournissent aussi une vitrine. Et ceci pour deux raisons :

1) Parce que je travaille sur des concepts à partir de carnets déjà faits, sans prendre en compte la reproductibilité de l'idée d'une part - il s'agit davantage de projets de livres d'artiste qui s'approprient le support (découpe ou ornementation de la couverture, découpe ludique ou déchirure volontaire des pages...)

2) D'autre part, parce que je suis particulièrement sensible à l'objet fini, je veux dire fabriqué en usine. Je me projette plus facilement dans des "projets d'édition" plutôt que dans des "expériences graphiques et littéraires éphémères". Les sociétés en ligne d'aide à l'autoédition me permettent d'avoir en main des ouvrages de belle facture que je ne suis pas capable de réaliser toute seule, pour le moment.

Je n'ai donc pas encore franchi le pas de la production d'un fanzine de type feuillet double cousu à la main, par exemple, car une telle production suppose, selon moi, un lieu ou une occasion pour être montré et surtout, des conditions d'entreposage particulier - qui la préserve. C'est cette interrogation qui me vient lorsque je visite pour la seconde fois le salon Fanzines ! Du coup, je me pose d'autres questions parce que je suis d'une nature curieuse d'abord, et parce que je suis sensibilisée à la représentation, la préservation et la diffusion des œuvres graphiques dans l'espace public.

Mon premier imagier en autoédition
Extrait de filles, recueil de portraits et de textes humoristiques. 
Autopublié. 2013

Par exemple : quelle visibilité toutes ces créations originales peuvent avoir en dehors du festival ? N'y a-t-il pas comme une contradiction dans le fait qu'une bibliothèque publique accueille, catalogue et donc rende disponible comme n'importe quel document des créations aussi singulières que les fanzines dont le charme et la logique surtout résident - justement - dans leur caractère non institutionnel ?   Quel type de traitement intellectuel et physique s'applique par conséquent au fanzine ? Est-ce qu'il circule ? S'il est abîmé ou déchiré accidentellement, le change-t-on, est-on en mesure de le faire, est-il envoyé en reliure comme c'est le cas pour un livre "classique" ?...

En faisant  la recherche sur internet d'autres références documentaires traitant du fanzine, je trouve par hasard un dossier publié dans  Matières graphiques, intitulé F comme Fanzines d'Emilie Mouquet et publié sur le site du BBF (Bulletin des bibliothèques de France). Très référencé, il propose notamment un approfondissement et une ouverture de ces premières réflexions, dresse une typologie des fanzines... Je le recommande vivement.



Sitographie

Pour aller plus loin, on peut consulter avec enthousiasme et à satiété : 
*Teal Triggs, Fanzines, la révolution du Diy, éd. Pyramid, 2010 en téléchargement gratuit 
*Le site de la librairie en ligne La pétroleuse
*L'article publié dans le n°6 de la revue en ligne Matière graphique
*Le site de la fanzinothèque de Poitiers 
*Le site de la petite fanzinothèque belge 
* Un exemple de communauté virtuelle de créateurs de graphzines 
* Sur quelques techniques d'impression 

© ema dée