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mercredi 17 juin 2020

Déconfinement # 7 : Mon imagier de confinement - Une Paire de Lunettes au Feutre

La vie telle que je l'expérimentais jour après jour s'est mise sur pause. Comme dans un film, vues simultanées sur le monde, avant le confinement, avant le "grand endormissement"... Ubiquité imaginaire, bien sûr, j'imagine, bien sûr...


... la fourmilière dans les transports en commun, les badauds lèche-vitrines, cut, les grandes surfaces, les supérettes, les boutiques "Bonnes affaires & variétoche sur les ondes", cut, les terrasses bondées, fumoirs des bars branchés, le petit café PMU, les habitués clopes au bec, café serré autour de la table en formica, brèves de comptoir dès 7h matin : "le Quinté, c'est plus que c'était", cut, la boulangère dorée et bien polie, et pour la d'moiselle, c'sera quoi, c'matin ?, la caissière soucieuse, l'hôte d'accueil du CCAS, la factrice souriante, jaune et tintante, cut, plan raccord sur une colonne Morris : " La critique applaudit ! le spectacle de...", cut, le boulevard Rochechouart Paris 9ème ou 18ème arrondissement, le micro-square, les cars vides de touristes agglutinés, les boutiques bigarrées à touristes surexcités, les snacks à touristes affamés et ravis, la supplique gutturale des pigeons, les sauts des moineaux autour, cut, les marches de L'Élysée Montmartre rutilant, les grilles de La Cigale, la moquette flambant rouge vermillon du Cinéma Pathé Gaumont, cut, une église cubique, cut, L'heure de tous d'Arman, les trottoirs haussmanniens, cut, la file d'attente étudiante à la BPI Centre Georges Pompidou, les portes vitrées roses du Forum des Images, cut, le tapis roulant métro Invalides direction la ligne C du RER, cut, la Tour Montparnasse, cut, un jardin avec trois vieux papis assis sur un banc, et un parapluie — le temps se couvre.

Puis le silence. Plan fixe sur l'immeuble en vis-à-vis.

Puis, par bribes. Des nouvelles. De ma planète. Ça tombe bien ; en regardant mon frigo tapissé de billets de réservation pour des spectacles variés comme divers, je me demandais justement si ou quand : ..."le concert de... est annulé, la représentation de... est suspendue jusqu'à..., le musée est actuellement fermé pour..., avis de fermeture de la galerie pour cause de... , en raison de la pandémie de Coronavirus, votre vie culturelle et artistique est suspendue pour une durée indéterminée. Saurez-vous retenir votre respiration dans l'intervalle ?"... Heureusement, j'accède à tout plein de (nouvelles) ressources à exploiter, de quoi me préparer à une belle orgie culturelle et artistique à distance ; je me bâfre ; je me surexpose : documentaires d'Arte, archives de la Cinémathèque française, visites virtuelles des galeries d'Art, newsletters des agitateurs poétiques, zoom sur la création graphique contemporaine, ouverture d'ateliers d'écriture en ligne, salon du livre en ligne, concerts unplugged en ligne, ateliers d'arts plastiques en ligne... je réponds à des sollicitations, écrits brefs et photos à partager, coloriages à partager, lectures à voix haute à la maison... de quoi attendre la réouverture des théâtres, des salles de concert, des centres culturels municipaux... sans trop souffrir d'asphyxie. Et éviter la bouderie dans mon alcôve.

Au bout de deux semaines cependant, c'est l'overdose... Diagnostic : "rétinite aigüe de l’œil droit et abattement neuronal généralisé consécutif à une surexcitation émotionnelle ". En plus clair : "strabisme aggravé de la sensibilité par ingestion compulsive de plaisirs numériques hétéroclites". Va falloir se discipliner. (Faut te secouer, ma fille !) Posologie fortement recommandée pour les semaines à venir : une seule découverte/ jour ou une activité récréative/ jour ou une prise de participation à/ jour et se remettre au boulot. Sérieusement.

Avec le déconfinement entamé depuis la mi-mai, ici, le réveil des lieux de tous les plaisirs se fait par paliers. Moi, le confinement m'a comme désarticulé la curiosité, et puis, l'enthousiasme, la fébrilité aussi et l'impatience. Je les retiens, tous, je me retiens et j'attends... 

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6 - Vue intérieure (Une paire de Lunettes au Feutre)




Jour 1 (17/03/ 2020) : Migraine matinale qui dure évidemment toute la journée sinon c'est pas drôle. Je suis barbouillée. Ma vision s'est troublée après une sieste prolongée dans la chambre. J'ai bu l'eau du robinet : dégueu ! 

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Chaque mercredi (autant que possible), mes nouvelles du dedans, accompagnées d'un extrait de mon carnet de gribouillis entamé en mars 2020, et publiées depuis ICI.

© ema dée

mercredi 10 juin 2020

Déconfinement # 6 : Mon imagier du confinement - Une Chaussure au Crayon et au Feutre

Depuis plusieurs semaines, je livre ici quelques pensées. Je les accompagne d'un dessin issu d'un carnet de croquis, un journal de bord fait à partir de gribouillis tracés au fil des jours — deux mois ! Quelles pensées ? D'abord des bribes de celles qui m'ont traversée durant le confinement, ensuite, celles que m'évoque au quotidien la reprise, le déconfinement, chacun reprenant à sa manière et à son rythme autant que possible, autant que souhaité, autant que commandé, le chemin de sa reprise, de ses bonnes ou inconfortables habitudes. 


Il se peut que chaque article aborde un ou plusieurs thèmes. Leur fil conducteur ? Faire trace d'une expérience sensible qui émerge depuis l'intérieur. 

Il paraît que des renards, des biches et d'autres animaux sauvages habitués à rester confinés dans les forêts et les bois ont poussé loin leur promenade, jusque sur le pas de la porte des maisons individuelles. Qu'ils se sont aventurés ! Libres, curieux. Dans d'autres domaines que le leur. Repoussée la frontière entre les rues, les chemins et la forêt, le sous-bois, les clairières, les prairies ; repoussée la crainte. Comme j’envie celles et ceux qui, au petit matin, se sont retrouvés face à une boule de poils roux, à la queue touffue et pointue, face à une tête haute et fine aux grands yeux calmes... Ô nature matinale et rieuse !


Roucoulades et prunelle à l'affût en banlieue parisienne : j'ai eu, pour seuls visiteurs, des pigeons ; les gros volatiles ont fait des haltes prolongées et régulières sur le bord de ma fenêtre. Une fois, les voyant en groupe de quatre à cinq individus posés benoitement — conquérants tranquilles d'un nouveau territoire —, je me suis demandé s'ils avaient la moindre conscience, à l'instar des renards et des biches, la forêt, le sous-bois, qu'on vivait sur Terre quelque chose d'inédit et d'une vaste ampleur.

Hier, j'ai rencontré un petit vieux tout rose et tout tordu ; il m'a dit : "La pollution revient comme avant ; tout revient comme avant."

J'ai pris les transports en commun aujourd'hui ; après une appréhension toute légitime, j'ai goûté un moment la saveur de déplacements où chacun, chacune, moi, dispose d'un espace nécessaire pour respirer, élargi. J'ai rêvé que j'arpentais le quai de mon RER avec les bras tendus, sur ma gauche et ma droite. Je rencontrais nul obstacle ! À un moment, car les distances ne sont pas partout respectées — possiblement respectables — , les passagers repris dans leur quotidien reprennent leurs habitudes, l'espace urbain se rétrécit — mécaniquement ou involontairement. La peur du vide entre,  la moiteur réconfortante de la promiscuité, la pulsion irrépressible des sardines à l'huile ou le reconditionnement de la Machine ?

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6 - Observation pédestre (Une chaussure au Crayon et au feutre)


Jour 5 (21/ 03/ 2020)  : "Le confinement est devenu naturel ; je regarde par moments dehors ; il y a toujours des imprudents - tes qui déambulent dans le boulevard (sans masque), je me demande ce qu'ils fabriquent à la fin !"
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Le projet de pensées-dessins brutes qui revient rituellement chaque mercredi a commencé ICI.

© ema dée 

mercredi 3 juin 2020

Déconfinement # 5 : Mon imagier du confinement - Un Micro au Crayon

Hier, j'écrivais à une amie : "Comme sortir me manque ! Comme me retrouver avec ma moitié à la terrasse d'un pub et converser d'un évènement auquel nous venons tout juste de participer me manquent ?" Je demande à mon amie : "Et toi, comment fais-tu pour vivre, toi qui racontes, dans les bibliothèques, les centres culturels, toi qui lis à voix haute pour d'autres lieux encore ?"

 

J'ai ressenti durement l'annulation successive des concerts de musique rock prévus depuis longtemps ; j'ai ressenti durement l'annulation des représentations théâtrales réservées de longue date et dont la perspective me réjouissait profondément ; j'ai ressenti durement l'impossibilité de me rendre dans les musées, petits et grands alors qu'ils affichaient depuis la fin de l'année dernière une merveilleuse programmation, bien plus attractive que celles des années précédentes ; j’ai ressenti vivement le manque de fictions sur grand écran, de salles obscures... Ah ! le son méga dolby surround qui me rend apathique et sourde, momentanément — les trompettes retentissantes de la fiction ! 

Bouchée l'excitante perspective de découvertes en galeries d'art ou en librairies spécialisées...

Ce qui semblait acquis la Culture et l'Art à portée de regard, après quelques stations de métro s'est comme fragilisé, teinté d'incertitudes ; le quotidien riche de surprises, de rencontres artistiques, d'émotions renouvelées et d'expériences esthétiques toujours différentes, mémorables, mis entre parenthèses ; comme l'écolière privée de récréation à cause d'une météo capricieuse, je me retrouve désorientée, entravée, en colère.

(Par contre, je n’ai ressenti aucun regret à marcher dans le désert des rues silencieuses et propres, lorsque j’avais à sortir pour faire mes courses hebdomadaires, durant les deux mois de confinement ; la systématique oppression de la foule, l’oppressante présence de la machine humaine, la vrillante atmosphère poussiéreuse de travaux urbains, les jacasseries puantes des automobiles, elles, elles ne m'ont pas manqué. Les trottoirs, les rues, les boulevards, les quartiers familiers se sont éclaircis, allégés d'immondices et de circulations.)

J'attends le 22 juin avec impatience : on annonce la réouverture des salles de cinéma ; j'irai à vélo ! 

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5 À l'écoute (Un micro au Crayon)


Jour 24 (31/ 04/ 2020) : Le confinement ne me convient pas car je me rends compte de la précarité de ma situation. J'ai ma création pour attendre ; j'espère être capable de me "déconfiner" correctement.
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Pour appréhender le projet de récit de soi depuis le début, ce sera en cliquant sur ici.

© ema dée