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dimanche 31 janvier 2016

Dans les espaces étroits, dans les lieux fermés, dans l'obscurité silencieuse...

Ils étouffent. Ils paniquent. Ils frémissent...


Quand Eleezabeth monte dans l'ascenseur de sa cité HLM de Châtillon, Hauts-de-Seine, c'est toujours accompagnée. Au cas où elle se retrouverait coincée. Elle attend que quelqu'un prenne l'ascenseur pour y monter elle aussi - ça prend parfois un certain temps, ça dépend du moment de la journée. Être avec quelqu'un l'aide à se sentir courageuse. Elle peut partager sa peur : elle imagine son voisin ou sa voisine habité peut-être par les mêmes appréhensions, ça l'aide de ne pas être la seule. Avoir quelqu'un pour pouvoir parler. 

Pas pour se décharger sur l'autre, ni pour le prendre en otage de sa phobie, plutôt quelqu'un à rassurer pour se rassurer elle-même. Conjurer le sort qui aime la titiller et éloigner l'idée que peut-être, encore une fois, cette saleté d'ascenseur va tomber en panne. Et qu'elle va rester là - enfermée dans cette cage carrée et grise d'1 m 50 de côté - 30 minutes, deux heures, cinq heures peut-être, comme cette fois où, c'était un lundi matin et il avait gelé sur les routes, la Société avait tardé. A chaque fois que les portes se referment et qu'il est trop tard pour sortir,  elle se dit  "j'aurai dû prendre les escaliers". Mais quinze étages à monter, avec des courses.

Mamadu aime les salles de cinéma parisiennes, il est fan de productions indépendantes et friand de blockbusters. C'est aussi un peu un geek, il consent à l'admettre, il va voir les films dès leur sortie, il a adapté son emploi du temps de créatif à sa passion. Les yeux salivants, il découvre les petits bijoux cinématographiques de genre, dans des salles minuscules, en comité presque privé. Pour les blockbusters, c'est une autre histoire, car ils attirent le jour de leur sortie une foule considérable qui s'amasse dans des salles immenses. Mamadu doit s'arranger avec tous ces yeux autour de lui qui aspirent l'air qui devrait irriguer son cerveau, avec toutes ces jambes qui l'éloignent des portes de sortie. 

Impossible d'installer confortablement son espace vital sur plusieurs sièges en même temps. Aussi, parce qu'il ne conçoit pas, paradoxalement, d'assister à la projection d'un blockbuster à un horaire plus calme, en compagnie des cinéphiles de seconde et de troisième zones, il doit user de stratégies : il s'assoit sur le fauteuil - trop  rare - qui n'a qu'un seul voisin proche, ou sur un siège tout près de la porte de sortie - plus commode car moins couru. Le point de vue n'est pas terrible - il arrive qu'il entende les bruits de la rue toute proche - mais au moins assis là, il se sent en sécurité, prêt à se lever et à s'enfuir si quelque chose de soudain interrompt la projection. L'idée qu'il serait plus en sécurité chez lui est bien sûr incompatible avec sa passion pour le cinéma.

Lorsque Athénaë grimpe dans la rame de métro de la ligne 13, c'est toujours en tête de train. Elle s'assure de pouvoir occuper un siège dans un coin, au fond de la voiture, là où six personnes peuvent s'assoir, c'est la meilleure place. Parce que quand il y a du monde qui grimpe et qui grimpe et qui grimpe encore, elle préfère ne pas avoir à chercher désespérément du vide entre les têtes qui la dépassent, l'envahissent... Non! Elle préfère avoir juste trois personnes en face d'elle et rien derrière, à part le tunnel du métro, c'est moins angoissant. 

Mais c'est angoissant quand même, parce qu'il arrive à la rame de métro de s'arrêter sans raison, dans l'obscurité étroite du tunnel. Il arrive que ça dure, les passagers sont soudain silencieux, attentifs, résignés. Il arrive que les stratégies qu'Athénaë a développées en sophrologie n'agissent pas. Et, assise sur son siège, dans ce silence qui retient son souffle, dans cette obscurité immobile, la jeune femme tente de trouver dans les lignes de son roman qui se brouillent, dans la musique rock qui lui hurle dans les oreilles, l'oxygène suffisant pour ne pas défaillir...


La peur des espaces (clos, petits, démesurément grands, déserts) est l'une des phobies majeures dans la liste des peurs qui nous affectent. C'est une "aberration mentale de nature émotive dont le malade a pleine conscience, mais dont il est impuissant à se rendre maître" (Alexandre Cullerre, Les frontières de la folie.) La claustrophobie se mêle parfois à de l'agoraphobie chez un même individu. On définit la première comme "la peur des espaces confinés" et la seconde comme "la peur des espaces publics et, par extension, de la foule ; plus généralement, des espaces où la fuite est rendue difficile" (Wikipédia.) Les deux notions de nature complexe semblent intriquées : l'une pouvant générer l'autre bien qu'elles soient aux antipodes.

Les manifestations de la peur des espaces (fermés, confinés, surpeuplés ou vides) sont essentiellement internes, physiques et émotionnelles : l'appréhension peut se déclarer simplement à l'idée de se rendre dans un lieu qu'on sait habituellement peuplé mais qui ne le sera peut-être pas. Sur place, alors que l'espace se rétrécit, l'être est comme parcouru par une sorte décharge électrique : il prend conscience qu'il est entré dans un "piège". Arrivent les palpitations, la sensation d'avoir très chaud tout-à-coup et froid en même temps, une sorte de panique survient ensuite, avec l'idée folle, l'urgence insurmontable,  de sortir du lieu au moment où toute fuite en est impossible (trop de monde, portes closes...) L'être est engourdi, les capacités intellectuelles sont bloquées sur l'état d'enfermement et tournent en boucle autour de l'idée - la certitude absolue et irrationnelle  - de sa mort certaine

Les raisons qui expliquent la claustrophobie et l'agoraphobie, leurs causes ainsi que leurs manifestations représentent un vaste domaine de recherche sociale, psychiatrique et psychologique. Pour ma part, je pense qu'elles peuvent s'expliquer aussi par une très - voire trop - grande imagination combinée à un traumatisme qui n'est pas forcément lié à une situation d'enfermement mais qui s'y trouve associée, étrangement et fortuitement, comme imbriqués l'un dans l'autre. La peur des espaces représente un mystère personnel qui m'a donné envie d'écrire des textes et d'imaginer des images à son propos. Certains sont publiés dans mon recueil Peurs. Images & Textes, autopublié en 2014. 

http://www.blurb.fr/books/5201726-peurs (Cliquez sur l'image pour entrer dans le livre.)
Pour découvrir ou redécouvrir la genèse de ce projet de livre, c'est ici.  

D'autres écrits sont publiés sur ce blog :
- Un texte sur la peur des oiseaux 
- Une réflexion sur la violence

Le cinéma met en scène l'idée d'enfermement (physique ou mental) de manière directe ou indirecte ; on peut se revisionner, par exemple : Buried de Rodrigo Cortès, Gravity d'Alfonso Cuaron, Panic Room de David Fincher, 127 heures de Danny Boyle, La tranchée de Mickael J. Bassett, Open Water en eaux profondes de Chris Kentis, Shutter Island de Martin Scorcèse, Cube de Vincenzo Natali, Thomas est amoureux de Pierre-Paul Renders et Copycat de Jon Amiel

© Ema Dée

vendredi 22 janvier 2016

Un portrait d'anniversaire pour Thomas

Quarante-et-unième année de son voyage d'agrément en Terre humaine. 

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Thomas le Bon, navigateur aguerri et grand collectionneur d'expériences,  se promet d'être tout particulièrement gentil, effronté, audacieux, mélomane, combattif, inspiré, drôle, mystérieux, fêtard, expansif, inventif, méthodique, volontaire, sûr de lui, convaincant, délicat, bon vivant, généreux, poétique, attentif, amical, curieux, loufoque, honnête, charismatique, empathique, original, rieur, teigneux, emphatique, décalé, engagé, vif, amoureux, chaleureux, taquin, imprévisible, passionné, aventurier, enthousiaste et authentique.

De quoi faire la fête dès aujourd'hui, non ? Alors ? Bon anniversaire !

vendredi 8 janvier 2016

De tes nuits vers les miennes

 
Apporte-moi des rêves de tes nuits,
Je n'en peux plus de mes cauchemars.


(Extrait de mes phrases brèves, 2014-2016)
  
© ema dée

jeudi 7 janvier 2016

Charlie, hier, aujourd'hui, demain...


Une contribution dans un style dépouillé... Une pensée douloureuse teintée de poésie malgré tout... et de rires, quand même... bien sûr... toujours.  Les célébrations font parfois remonter l'amertume et la colère, je vous invite à découvrir la production "coup de poing" de Thomas.

© ema dée

mardi 5 janvier 2016

Un hiver résolu avec Arthur Rackham

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Vos résolutions pour 2016 ?

Les fêtes de fin d'année et les vacances de Noël s'éloignent à peine que déjà, il faudrait remettre le pied à l'étrier ! 2015 a tout juste disparu - derrière nous - qu'il faudrait déjà se projeter dans 2016. L’estomac, le coeur, l'être ! rempli d'espoir et de vœux pour un temps à venir meilleur, plus intéressant, plus passionnant, plus riche, plus secure. En théorie. Car qui décide qu'un temps est révolu - et résolu - pour en faire advenir un autre ? Le passage d'une année à l'autre signifie-t-il changement ? Un changement pour qui ? Et de quel ordre est ce "changement" ?

Des sapins de Noël défraîchis décorent déjà le bas des cours d'immeubles et le coin des rues. Certains resteront installés sur un balcon jusqu'à l'été ; des retardataires iront jusqu'à attendre, comme l'année dernière, l'année d'avant, le siècle dernier, longtemps, un certain temps – particulier - pour se défaire, enfin, de leur sapin. Pour étirer le temps? Pour imposer leur propre mesure du temps, leur calendrier personnel ? 

Il est temps d'être résolu à, il est temps d'espérer que, il est temps de changer de, il est temps de commencer à... Dressons notre liste de résolutions. En janvier, advient le temps des résolutions, des bonnes. Commandement extérieur ? Rituel collectif ? Nécessité intérieure ? Ralliement symbolique et universel autour de la conviction que ce sera mieux maintenant ? Non. Plutôt, une sorte d’inventaire – nous serons soutenus dans l’exercice par des médias toujours au taquet – de ce que l’année 2015 nous doit, n’a pas apporté, a gardé pour elle ou a omis de faire pour nous. Plutôt une projection indicible dans un à venir plus généreux.

S'agit-il d'invoquer aussi des Esprits protecteurs dans l'intimité de son carnet de notes, dans le privé de son agenda, dans le secret de son cœur pour, qu'effectivement, il se passe quelque chose ? … De bien, j’entends… de durable aussi, on peut rêver, non ?  Je propose que chacun dessine dans sa grotte intérieure des messages rupestres : objectifs à cornes, attentes au galop, désirs poilus, prières en écailles, vœux à plumes. A regarder sans compter. Et d'y graver toutes ces sortes de choses magiques, toutes ces formules et ces mantras - indispensables. A répéter chaque matin, devant sa glace, au petit déjeuner - seul(e) ou en famille, dans sa voiture ou dans le métro... Pour SE donner la possibilité - parce qu'elle ne peut venir que de soi - de devenir ce qu'on doit être ou d’affirmer ce qu’on est déjà. Ou encore, pour trouver l’énergie flamboyante de résister à l’apathie et de combattre la résistance du corps et de l'âme au bonheur fondamental.

Ca se fera par touches, le changement significatif arrive par touches, tranquillement, d’un pas chaloupé et discret, sans qu’on s’en aperçoive… Ou il viendra à toute vitesse, dans une urgence inexorable. Qui sait ?
 

Un bel hiver à toutes et à tous et une entrée sereine dans cette nouvelle année, sous l'oeil malicieux de l'illustrateur anglais Arthur Rackham auquel j'ai eu envie de rendre un hommage très personnel, avec cette nouvelle composition en noir et blanc.

© ema dée